Maladies causées par la non-vaccination en France : bilan 2024 alarmant

La France traverse une crise sanitaire silencieuse. Plusieurs maladies évitables par la vaccination connaissent une résurgence inquiétante malgré une couverture vaccinale globalement élevée.

L’année 2024 a marqué un tournant avec des épidémies majeures qui ont causé des centaines de décès, frappant principalement les populations les plus vulnérables.

Les données officielles de Santé Publique France dressent un tableau contrasté où certaines maladies, pourtant éliminables, refont surface avec une virulence inattendue.

La coqueluche : une épidémie historique en 2024

L’épidémie de coqueluche de 2024 marque un record historique depuis 25 ans. Le réseau Sentinelles a estimé à 156 551 le nombre de cas survenus entre janvier et novembre 2024, un chiffre qui témoigne de l’ampleur exceptionnelle de cette résurgence.

Cette épidémie s’est révélée particulièrement meurtrière avec 42 décès rapportés, dont 23 enfants. Parmi ces victimes, 20 nourrissons de moins d’un an ont perdu la vie, soulignant la vulnérabilité extrême de cette population trop jeune pour être vaccinée. Les adultes n’ont pas été épargnés : 19 décès ont été recensés, principalement chez les personnes âgées de 80 ans et plus.

Impact hospitalier de la coqueluche

Le réseau RENACOQ a documenté 305 hospitalisations de nourrissons de moins de 12 mois, dont 244 (80 %) concernaient des enfants de moins de 6 mois. Ces chiffres dépassent largement ceux observés lors des précédents pics épidémiques de 2012 et 2017.

Un défi supplémentaire émerge avec la résistance aux antibiotiques : 17 échantillons résistants aux macrolides ont été caractérisés par le Centre National de Référence, représentant 1,9 % des souches analysées.

La rougeole : multiplication par quatre des cas en France

La rougeole a connu une explosion des cas en 2024, avec 483 cas déclarés contre seulement 121 en 2023, soit une multiplication par quatre. Cette recrudescence s’accompagne d’un déplacement vers des tranches d’âge plus élevées, l’âge médian des cas atteignant 13 ans.

Populations les plus touchées par la rougeole

Les nourrissons de moins d’un an demeurent la population la plus touchée avec un taux d’incidence de 11,14 pour 100 000 habitants, représentant 69 cas soit 17,3 % du total. Cette vulnérabilité particulière s’explique par l’impossibilité de vacciner avant l’âge de 12 mois.

L’impact hospitalier reste significatif : 144 patients ont été hospitalisés, dont sept en réanimation. Les complications ont concerné 66 cas, principalement des pneumopathies. Près de la moitié des complications rapportées touchaient des adultes de plus de 30 ans, démontrant que la rougeole n’épargne pas les adultes.

Statut vaccinal des cas de rougeole

L’analyse du statut vaccinal révèle des lacunes importantes : parmi les 300 cas éligibles à la vaccination avec un statut documenté, 64 % n’étaient pas vaccinés selon les déclarations obligatoires. Seuls 18 % avaient reçu les deux doses recommandées.

Les infections invasives à méningocoque : record depuis 2010

L’année 2024 a été marquée par 616 casd’infections invasives à méningocoque, soit une augmentation de 10 % par rapport à 2023 et le nombre annuel le plus élevé depuis 2010. Cette recrudescence confirme la tendance observée depuis 2022.

Répartition des sérogroupes de méningocoque

La répartition des sérogroupes montre une diversité inquiétante :

  • Sérogroupe B : 269 cas (45 %)
  • Sérogroupe W : 166 cas (28 %)
  • Sérogroupe Y : 141 cas (24 %)
  • Sérogroupe C : 12 cas (2 %)

Cette faible proportion du sérogroupe C témoigne de l’efficacité de la vaccination obligatoire instaurée pour les nourrissons.

Gravité des infections à méningocoque W

Les infections du sérogroupe W se distinguent par leur gravité exceptionnelle, avec un taux de létalité de 16 %. Ces infections sont associées à deux complexes clonaux (cc 11 et cc 9 316) en expansion sur le territoire français.

L’évolution épidémiologique révèle des patterns alarmants : les nourrissons et les personnes âgées de 80 ans et plus présentent les taux d’incidence les plus élevés pour les sérogroupes W et Y. Le début de l’année 2025 confirme cette tendance avec 90 cas survenus en janvier seulement.

Autres maladies évitables par la vaccination

Le tétanos : mortalité élevée chez les personnes âgées

Le tétanos illustre parfaitement les conséquences d’une vaccination insuffisante chez les personnes âgées. Entre 2012 et 2021, 48 cas ont été déclarés avec un taux de létalité de 29 %. La maladie touche principalement les personnes âgées, avec 71 % des cas survenant chez les 70 ans et plus, témoignant d’une couverture vaccinale insuffisante pour les rappels.

Trois cas pédiatriques ont été signalés chez des enfants de 3 à 8 ans, tous non vaccinés, rappelant l’importance de la vaccination systématique dès le plus jeune âge.

La diphtérie : résurgence liée aux flux migratoires

La diphtérie a connu une augmentation notable avec 18 cas rapportés en 2023, principalement chez des personnes migrantes non vaccinées. Cette résurgence souligne l’importance de la vaccination dans les populations nouvellement arrivées et les défis sanitaires liés aux mouvements de population.

La poliomyélite : succès vaccinal exemplaire

La poliomyélite constitue le symbole de la réussite vaccinale avec une élimination complète depuis 1995. Aucun cas n’a été déclaré en France depuis cette date, démontrant l’efficacité de la vaccination systématique et l’importance du maintien de couvertures vaccinales élevées.

Causes de la résurgence des maladies évitables

Impact de la pandémie COVID-19 sur l’immunité

La pandémie a créé une « dette immunitaire »particulièrement visible pour la coqueluche et la rougeole. Les mesures sanitaires ont interrompu la circulation naturelle de ces pathogènes, créant une population « immunologiquement naïve » plus vulnérable lors de la reprise des contacts sociaux.

Lacunes de couverture vaccinale en France

Les données révèlent des insuffisances persistantes : la couverture vaccinale contre la rougeole ne permet pas d’atteindre les 95 % nécessaires à l’immunité de groupe. Pour la coqueluche, la diminution de la protection vaccinale avec le temps explique en partie la vulnérabilité des adolescents et adultes.

Populations vulnérables non vaccinées

Les nourrissons trop jeunes pour être vaccinés constituent le groupe le plus à risque. Les personnes âgées souffrent quant à elles d’une couverture vaccinale insuffisante pour les rappels, particulièrement visible pour le tétanos et la diphtérie.

Conséquences sanitaires et économiques

Mortalité évitable liée aux maladies

L’année 2024 a été marquée par des centaines de décès évitables :

  • 42 décès pour la coqueluche
  • 69 décès pour les infections invasives à méningocoque
  • Décès liés au tétanos et aux autres maladies évitables

Ces décès touchent principalement les plus vulnérables : nourrissons et personnes âgées.

Charge hospitalière des maladies évitables

Les hospitalisations représentent un coût considérable :

  • 144 hospitalisations pour la rougeole
  • 305 nourrissons hospitalisés pour la coqueluche
  • Milliers de consultations et de passages aux urgences

Cette charge pèse lourdement sur un système de santé déjà sous tension.

Séquelles à long terme

Les infections invasives à méningocoque peuvent provoquer des séquelles dans 20 à 25 % des cas. La coqueluche chez les nourrissons peut entraîner des complications neurologiques durables. Ces séquelles représentent un coût humain et économique considérable.

Solutions et perspectives d’amélioration

Renforcement de la surveillance épidémiologique

La recrudescence observée nécessite un renforcement des systèmes de surveillance épidémiologique. Les réseaux Sentinelles, RENACOQ et les déclarations obligatoires doivent être optimisés pour une détection précoce des épidémies.

Amélioration de la couverture vaccinale

L’extension des obligations vaccinales, comme celle récemment instaurée pour le méningocoque ACWY, constitue une réponse adaptée. Cependant, des efforts particuliers doivent être portés sur les rappels chez les adultes et les populations migrantes.

Adaptation des stratégies vaccinales

L’émergence de souches résistantes ou de nouveaux sérogroupes nécessite une adaptation constante des stratégies vaccinales. La vaccination des femmes enceintes contre la coqueluche représente une piste prometteuse pour protéger les nourrissons.

Bilan et perspectives pour 2025

Le bilan 2024 des maladies évitables par la vaccination en France révèle une situation alarmante qui nécessite une mobilisation urgente. La résurgence de la coqueluche et de la rougeole, l’augmentation des infections invasives à méningocoque et la persistance du tétanos chez les personnes âgées témoignent des lacunes persistantes dans notre système de prévention.

Ces résurgences ne constituent pas une fatalité : l’élimination de la poliomyélite et le contrôle des infections à méningocoque C démontrent l’efficacité de la vaccination lorsqu’elle est appliquée de manière systématique. L’enjeu est désormais de maintenir et d’améliorer les couvertures vaccinales, particulièrement chez les populations les plus vulnérables.

Face à ces défis, une approche coordonnée impliquant les professionnels de santé, les autorités sanitaires et la société civile s’impose pour prévenir de nouvelles épidémies et protéger les plus fragiles. La vaccination reste notre meilleure arme contre ces maladies évitables qui continuent, malheureusement, de faire des victimes en 2024.